L'INTERVIEW |
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Saison 2008/2009 |
- Retour sur une accession avec l'entraîneur du DBHB, Denis Lathoud -
« On aurait pu baisser les bras »
Aux commandes de l'équipe du Dijon BHB dès sa première saison en D2, Denis Lathoud, dont l'objectif était de permettre
à Dijon de retrouver l'élite, a mené sa barque à bon port, puisque trois ans plus tard, les Dijonnais accèdent à la LNH.
Samedi soir, à Besançon, au terme d'une rencontre insoutenable quant au suspense, le Dijon BHB obtenait un match nul (27-27) et
par là même son billet pour la D1. Explications de son entraîneur, Denis Lathoud.
- Quel est votre sentiment, à cet instant ?
« On avait monté un projet sur trois ans. Le contrat est rempli. On est très satisfait de ce que l'on a fait aujourd'hui et sur
ces trois ans. Le match contre Besançon ne restera pas dans les annales, mais il faut savoir s'en contenter. Ça reflète un peu
notre saison. On a alterné du très mauvais et du très bon. On a tout condensé dans un même match. »
Le déclic
- Qu'est-ce qu'il y a à l'intérieur : De la joie ? Du soulagement ? La satisfaction du devoir accompli ?
« C'est surtout un devoir accompli. C'était un pari avec les dirigeants il y a trois ans. On savait que rien ne serait simple et
que tout serait compliqué. On l'a fait. On est donc très content de ce que l'on a accompli pendant trois ans. On ne va pas
s'arrêter là, évidemment, mais c'était un objectif et on est vraiment satisfait de l'avoir rempli, parce que je peux garantir
que la saison n'a pas été facile. Avec un début de championnat complètement raté, avec nos problèmes financiers aux mois de
février-mars, le groupe a quand même bien réagi. Coup de chapeau à ce groupe qui ne s'est jamais divisé, qui a su répondre présent
au moment où il fallait. Leur travail est quasiment fini. Il leur reste à réaliser une belle prestation devant notre public face
à Belfort pour finir la saison de toute beauté et faire une grande fête que l'on attend depuis trois ans. »
« Ce soir, il y a une joie intérieure qui est beaucoup plus forte qu'après le match contre Nancy, où ça n'était qu'une étape. Ce
soir, on a validé notre billet, c'est le plus important. »
- Ce qui a été primordial, cette saison, c'est de toujours y croire, depuis le début ?
« On a fait un très mauvais début de saison, certes, que l'on a traîné comme un boulet jusqu'au mois de février. Jusqu'au moment
où on est allé gagner à Aix-en-Provence. Ça a été vraiment le tournant de la saison. Si nous avions eu cinq points de retard
sur Aix, je ne crois pas qu'ils auraient craqué comme ils ont craqué. Depuis le mois de novembre, où nous sommes allés gagner
à Saint-Cyr, où ça a été le déclic de la saison, les joueurs ont beaucoup travaillé. Ils se sont accrochés. Ma grande satisfaction,
c'est d'avoir emmené cette équipe en première division. »
« On aurait pu baisser les bras après les cinq premiers matches, où nous n'avions pas une seule victoire. On aurait pu baisser les
bras plus tard, quand on a perdu à Billère. On aurait pu baisser les bras quand nous avons eu nos problèmes financiers. Au
contraire, on a été tous solidaires, les bénévoles, les dirigeants, l'entraîneur, les joueurs, le staff, tout le monde. C'est
une juste récompense aujourd'hui par rapport au travail fourni pendant trois ans. On va savourer. »
Tous solidaires
- Il fallait aussi y croire parce que lorsqu'on regardait le classement, semaine après semaine, Dijon n'a quasiment jamais été
en position de promu...
« Jamais. Mais, on s'est donné les moyens, en allant gagner à Saint-Cyr, à Aix. L'objectif, c'était de ne jamais baisser les bras
malgré notre début de saison, de toujours y croire. On y a cru. A force de grignoter, on est passé devant tout le monde. »
- ça a été ça, la force, les grandes qualités de cette équipe ?
« Elle a la qualité de ces défauts, en étant capable de très bien jouer comme de très mal jouer. On l'a vu ce soir (samedi), dans
le résumé de la saison qu'a été ce match, avec une première mi-temps catastrophique et une deuxième où on a maîtrisé notre sujet,
avec une fin anecdotique puisqu'il ne nous fallait qu'un point. »
- D'un point de vue plus personnel, par rapport à votre carrière de joueur, d'entraîneur ensuite, que représente cette montée ?
« C'est une transition qui est importante. Ce n'est pas parce qu'on a été un bon joueur que l'on est un bon entraîneur. Aujourd'hui,
entre mon expérience à Vernon, où j'avais emmené le club à la quatrième place de la D2, et ici, où en trois ans j'ai fait monter
un club en D1 alors qu'il venait d'accéder à la D2, ce ne sont pas des choses simples. J'ai prouvé aujourd'hui que j'étais capable
d'entraîner, que j'avais le niveau. C'est une satisfaction personnelle. C'est mon métier. Je n'en étais pas sûr au départ. »
- A Vernon, d'ailleurs, vous n'aviez pas pu aller au bout du projet. C'est une petite revanche ?
« Pas forcément. C'est vrai que j'avais arrêté le chemin en route. Je voulais les emmener en D1. Je l'avais fait en partie en tant
que joueur, ensuite en partie en tant qu'entraîneur. On ne m'a pas laissé le temps de le faire. Aujourd'hui, je dis aux dirigeants
de Vernon que s'ils m'avaient laissé le temps, on serait peut-être encore en D1 et pas en N1. »
- Lathoud : « Un rêve de gosse » -
C'est l'histoire d'un pari fou d'un ancien « Barjot ». Ancien champion du monde de handball et actuel coach du DBHB,
Denis Lathoud est tombé dans la marmite rugbystique. Dans les rangs de Tango XV, il s'éclate comme un gamin.
Tango XV est un nouveau-né sur la scène rugbystique. Composé de plusieurs anciens joueurs du giron bourguignon et
particulièrement genlisien, il compte dans ses rangs un " papa " de renom : Denis Lathoud.
Incroyable.
- « J'ai joué au hand jusqu'à quarante ans. J'étais overdosé. Depuis deux ans, je n'avais rien fait. J'étais devenu
une grosse daube », lâche sans détour l'intéressé.
- « Je cherchais à pratiquer une activité physique. Julien (Rolland) m'a parlé de ce club. C'est parti comme ça. »
Voilà comment l'un des plus grands athlètes français, qui n'avait jamais chaussé de crampons de sa vie, se retrouve à 42 ans
à ferrailler chaque dimanche en 3e-4e série, à Langres, Chaumont ou encore Varennes-Vauzelles... Et que les mauvaises
langues ravalent leur venin, si le coup médiatique est à la hauteur d'un Max Guazzini, le désormais deuxième ligne
prend les choses très au sérieux.
- « On s'entraîne le mercredi soir. Qu'il neige ou qu'il pleuve, on est tous là et c'est vraiment bonnard ! J'apprends
en permanence. Je comprends aujourd'hui la notion et l'utilité d'avoir ce que l'on appelle des ballons propres », explique-t-il,
avant de poursuivre :
- « C'est une découverte totale sur le terrain. Je réalise un rêve de gosse. Quel bonheur ! »
« Une leçon d'humilité »
Vêtu du survêtement de Tango XV, Denis Lathoud est fier comme un pape. Avec l'écusson du club sur le cœur, il ne tarit pas
d'éloges sur sa nouvelle expérience.
- « Lors de notre premier match à Varennes-Vauzelles, nous étions dix-sept présents dont sept blessés. J'ai halluciné.
L'un d'entre eux pouvait à peine marcher à la sortie du bus. On aurait dit "Crayon" dans le film Une Epoque formidable.
Ce gars-là s'est échauffé puis a tenu tout le match en plaquant à tour de bras. C'est un truc de fou ! Un autre avait
des côtes cassées. Il a aussi joué et on a gagné sans trembler (27-3). On aurait dit la cour des miracles. »
Les anecdotes s'enchaînent. Intarissable, il fait sans cesse part de son admiration pour ces sportifs du dimanche.
- « Ces hommes-là ne jouent pas pour la prime. C'est la vérité du sport. C'est une leçon d'humilité. Je dis respect. »
Une notion que ses adversaires ignorent parfois.
- « Souvent, on vient me serrer la main. Je ne suis pas la cible, mais certains tentent de temps en temps de me désosser.
Je te rassure, ils n'y arrivent pas. Il y a des fous ! »
Trois mois après son baptême du feu et un essai à la clé, l'aventure bat son plein. Tango XV est invaincu en championnat
après neuf journées. Dimanche dernier, Lathoud et les siens ont même inscrit un record de points face à Bazois (143-0).
- « C'était une boucherie ! Ma femme ne m'a pas cru », rigole-t-il.
En attendant peut-être mieux.
- « Devenir champion de France et soulever un bouclier, ça dégage quelque chose », conclut-il, les yeux pétillants.
Doté d'un des plus gros palmarès tricolores, Denis Lathoud rêve désormais d'un titre de champion de France de 3e ou 4e
série de rugby. C'est sans doute ça aussi la magie du sport.